Moi de toute façon je prêche la non-violence…
30 septembre 2016 23:9:21
" Il y a beaucoup de causes pour lesquelles je suis prêt à mourir mais aucune cause pour laquelle je suis prêt à tuer"
La deuxième moitié du mois de septembre est bien entamée
(N’ayant pas forcément quelque chose d’intelligent à dire à tous les coups, je me réfugie dans des truismes de ce genre… Mais on m’a dit que l’essentiel était de m’en rendre compte !)
La faculté de l’homme de se diviser lui-même en parties et de ressentir une quelconque partie de lui-même comme constituant son véritable Moi, qui entre en conflit avec d’autres parties et lutte pour la détermination de son activité – cette faculté met fréquemment l’homme, pour autant qu’il a conscience d’être un être social, dans une relation d’opposition aux impulsions et intérêts de son Moi qui restent extérieures à son caractère social : le conflit entre la société et l’individu comme un combat entre les parties de son être.
Georg Simmel, Sociologie et épistémologie, 1981, pp. 137-138.
Je mets à jour les structures de fond, un sacré turbin… non rémunéré de surcroît… (on ne rémunère pas les gens pour les efforts qu’ils font pour se mettre en état de besogner… il faudra le suggérer aux syndicats !)
Bon… je m’active…
La chronique est lancée
C’est vraisemblablement neuf et hallucinant mais je démarre cette chronique par une référence à Marx :
Imagine l’homme humain et son rapport au monde comme un rapport humain, et tu ne pourras échanger l’amour que contre l’amour, la confiance que contre la confiance, etc. Si tu veux jouir de l’art, tu devras avoir une culture artistique ; si tu veux avoir un ascendant sur autrui, tu devras être capable d’agir pour le bien des autres et exercer une influence stimulante. Chacun de tes rapports avec l’homme – et avec la nature – devra être une manifestation déterminée, conforme à l’objet de ta volonté, à ta vraie vie individuelle. Si tu aimes sans susciter l’amour réciproque, si ton amour ne provoque pas la réciprocité, si vivant et aimant tu ne te fais pas aimer, alors ton amour est impuissant, et c’est un grand malheur.
Karl Marx
Pourquoi Marx ? Et bien parce que l’actualité de ce 30 septembre 2016 produit comme une sorte de résurgence de propos marxistes, ou plutôt néomarxistes : ouvriers, classe ouvrière, syndicats, chômage, travail, employeurs, salariés, CGT, Medef, entreprises, multinationales, revendications, luttes, grève, profits, patrons, travailleurs, capitalisme, mondialisation… à croire que c’est une ruse de la raison historique ! Certes l’autonomie relative des morceaux choisis suivants ne donne pas immédiatement la clé des rapports de production sous-jacents mais il y a bien de ça, car dans une dépêche intitulée « A Saclay, on invente l’usine du futur », on peut lire :
« L’Etat a investi 820000 euros dans quatre d’entre eux.Et le secrétaire d’Etat à l’Industrie, Christophe Sirugue, a profité de sa venue à l’inauguration pour annoncer trois mesures : la nomination d’un chef d’entreprise dans chaque région pour le poste d’ » ambassadeur de l’industrie du futur « , 100 millions d’euros investis pour l’adaptation et la formation des employés aux nouvelles technologies et la création du premier salon de l’industrie du futur, du 6 au 9 décembre, avec l’Allemagne en invitée d’honneur. »
Et dans une autre, au titre suffisamment éloquent pour réveiller la critique de l’économie médiatique, « Espagne : le » beau « Sanchez, chef très contesté des socialistes » :
Quand il a pris en juillet 2014 les rênes du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), Pedro Pedro_Sanchez était inconnu du grand public.
Ce n’est peut-être pas surdéterminant, mais les « gens d’en bas » sont bel et bien présents et la lutte contre l’oppression capitaliste continue !
Franchement, il n’y a pas besoin de lire ou de relire Rancière pour voir dans ce qui suit que les structures de domination de l’impérialisme capitaliste surdéterminent les événements et les déclarations :
Pour la première fois des pays du Sud ont pu faire plier les multinationales et leurs pays.
« L’accord d’Alger de l’Opep : Nécessité d’une stabilisation des prix avec les pays consommateurs », Agoravox, 30 septembre 2016
La délinquance économique est un fil signifiant pour saisir les tensions internes au capitalisme, liées aux désaccords qui opposent les intérêts privés et les normes régulatrices imposées aux élites par le jeu de la démocratie formelle. Et ces conflits montent à la surface, agitant la superstructure : corruption, trafics, créances douteuses, détournement, ingérence, escroqueries… C’est le marché de ce 30 septembre d’une certaine manière !
Une dépêche est singulièrement dominante à cet égard : « Turquie : l’opposition contre la reconduction de l’état d’urgence ». On lit spécialement :
Pour M. Kilicdaroglu, le pouvoir se sert aussi des purges en cours pour régler ses comptes avec les réseaux gülénistes accusés d’être à l’origine d’un scandale de corruption impliquant M. Erdogan qui avait éclaté en décembre 2013.
Le propre de l’idéologie dominante, dont le patois ne cesse de se transformer pour mieux recouvrir les rapports d’exploitation, est de mettre en avant le rôle des personnes, en plongeant les événements dans un personnalisme généralisé, qui évite la rudesse de l’objectivisme économique. En laissant sa révélation à la charge des critiques de son idéologie, le système capitaliste et ses valets médiatiques font peser sur eux une logique du soupçon : il faut être odieux pour voir des relations de pouvoir là où agissent des individus (humains), des sujets plus ou moins émancipés. Comment en effet appréhender des gens comme M. Peres, M. Obama, Bill Clinton, M. Abbas ou encore John Lennon, qui dominent nettement l’actualité du jour comme de simples marionnettes des systèmes ? Et pourtant, quand on épie de près de quoi il retourne, on voit que les personnes sont bien animées par des mécanismes plus profonds :
Il a ouvert la séance, après une minute de silence, par une déclaration montrant à quel point le destin d’Israël et celui de Peres étaient liés : « C’est le premier jour de l’Etat d’Israël sans Shimon Peres ».
« Israël : la disparition de Peres suscite la nostalgie d’une autre époque », AFP, 30 septembre 2016
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu lors du discours prononcé pendant les obsèques de Shimon Peres le 30 septembre 2016 à Jérusalem copyright AFPEntre 09H30 (06H30 GMT) et 12H30, entre les prières, les rites funéraires juifs et une chanson interprétée par le contre-ténor David D’Or, les trois enfants du défunt, l’écrivain Amos Oz, les plus hauts dirigeants israéliens, l’ancien président américain Bill Clinton et, en dernier lieu M. Obama devaient exprimer leur affection et leur admiration.
« Israël : des dirigeants du monde entier aux obsèques de Shimon Peres », AFP, 30 septembre 2016
La campagne au lance-flammes d’Hillary Clinton montre que la fraction belliciste de l’oligarchie est décidée à poursuivre une politique agressive.
« Le moment Hillary », Agoravox, 30 septembre 2016
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, qui a salué en Peres « un grand homme » pour Israël et le monde, M. Obama, M. Abbas et de nombreux chefs d’Etat ont pris place au premier rang.
« Israël : des dirigeants du monde entier aux obsèques de Shimon Peres », AFP, 30 septembre 2016
Pour le dire encore autrement, la prétention à l’absolue domination de soi n’est que la face présentable d’un triste penchant à la domination de l’autre, et si je qualifie les oeuvres de John Lennon et Marvin Gaye de bienfaisantes, c’est parce qu’en réinvestissant la douceur d’une part, la fragilité et la plainte d’autre part, elles nous sortent radicalement de cette comédie étouffante et mortifère, et ré-ouvrent un autre monde relationnel possible, avec soi-même et avec les autres.
« Save the babies, save the babies (Quatrième partie) », LMSI.net, 30 septembre 2016
Inutile de réécrire ici les renommées formules de Marx à propos du 18 Brumaire, on voit les dangers qu’il y a à prendre les vessies pour des lanternes (surtout quand ces dernières ne sont pas rouges !)
Quels sont les nouveaux sigles ?
Le capitalisme communicationnel a besoin des sigles. Fonctionnant comme autant de codes permettant de détacher les valeurs sur le marché des biens symboliques, les sigles contribuent à l’aliénation des masses. Tous les jours de nouveaux sigles viennent immobiliser les capacités critiques en marquant la faille entre ceux qui ont accès aux données et ceux qui n’y ont pas accès. Cette fracture symbolique redouble la fracture économique et sociale. Par exemple, il faut savoir ce que signifient des sigles comme : PHBB, CSFRS, DIO, CCFLA, ONSPEA, UST
Pour bien prendre conscience de tout ce que la fraction bureaucratique de la classe dominante parvient à dissimuler sous les sigles – et comment les classes dominées sont conduites à se penser dans ce même jargon bureaucratique – il suffit d’ouvrir les nouveaux sigles du jour (que je découvre en même temps que toi !) :
- PHBB
- prêt de haut de bilan bonifié,
- CSFRS
- Conseil supérieur de la formation et de la recherche stratégiques,
- DIO
- détachements d’instruction opérationnelle,
- CCFLA
- Cities Climate Finance Leadership Alliance,
- ONSPEA
- Observatoire national des services publics d’eau et d’assainissement,
- UST
- Union des syndicats du Tchad
Je note les personnalités du jour
Les palmarès intéressent pas mal de monde sur cette planète. Je lis par exemple à propos de Mme Merkel, la chancelière allemande : La chancelière allemande Angela Merkel a détrôné la secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice comme femme la plus puissante de la planète, selon le classement 2006 des 100 femmes les plus influentes en termes de visibilité médiatique et de pouvoir économique, publié fin août 2006 par le magazine Forbes.
Je me demande si je finirai un jour dans un institut de sondage ou d’étude des médias !
Dans l’actualité de ce 30 septembre, les dix personnalités qui tendent à s’imposer sont : Peres, Obama, Clinton, Abbas, Lennon, Duclos, Valls, May, Gaye, Hollande,…
Et pour revenir à Merkel, je lis :
Le président américain Barack Obama et la chancelière allemande Angela Merkel ont condamné jeudi avec force « les raids aériens barbares des Russes et du régime syrien sur l’est d’Alep, une zone où habitent des centaines de milliers de civils, dont la moitié sont des enfants ».
« Syrie : Washington et Moscou au bord de la rupture, catastrophe humanitaire à Alep », AFP, 30 septembre 2016
L’état du palmarès des 30 premières personnalités de l’actualité
La comparaison des listes de personnalités qui occupent le devant de la scène enregistre principalement, on s’en doute, des stratégies de communication. Voici ce que l’on observe en se donnant comme période « ancienne » celle qui mène du 14 septembre 2004 au 9 septembre 2016 et comme période « récente » celle qui va du 10 septembre 2016 au 29 septembre 2016 :
Palmarès antérieur :
Nouveau palmarès :
La nécrologie du jour
Le néolibéralisme sait tirer profit de la mort. La mort est un marché certain comme on dirait au pôle Jourdan. La multiplication des services se fonde en tout cas sur l’idée d’un marché en plein essor.
D’ailleurs, Jean-Pierre Sirugue, président de la compagnie d’assistance de Voeu funéraire assistance, est persuadé que « le service au client ante et post mortem va profondément changer d’ici aux cinq ou dix ans à venir ». Un signe ne trompe pas : une licence universitaire de gestion et conseil des situations de deuil vient d’être créée à Paris-V.
Essayons de prendre un point de vue géopolitique
Bien que, pour une fois, les Etats-Unis n’occupent pas le tout premier plan de l’actualité (France et Etats-Unis arrivent en tête du « classement » ), il est clair que la géopolitologie ne peut faire l’économie des structures de pouvoir qui s’organisent à partir du leadership américain. C’est ce que montrent les relations Etats-Unis – Chine :
Les Européens ont mis les bouchées doubles pour ne pas apparaître comme un retardataire sur ce front climatique, depuis que la Chine et les Etats-Unis, principaux pollueurs de la planète, ont ratifié l’accord mondial sur le climat, désormais proche d’une entrée en vigueur.
« Climat : les 28 ouvrent la voie à une ratification « historique » de l’accord de Paris par l’UE », AFP, 30 septembre 2016
En termes d’image d’abord si l’Union est, du moins symboliquement, la partie qui permet l’entrée en vigueur du traité.Et politiquement ensuite par sa participation à la première réunion des parties à l’Accord de Paris, évitant ainsi d’être marginalisée dans les groupes de travail qui vont discuter de sa mise en oeuvre et où seront représentés la Chine et les Etats-Unis.
« Climat : l’UE donne son feu vert à la ratification de l’Accord de Paris », Actu Environnement, 30 septembre 2016
L’Union européenne s’inquiétait d’apparaître à la traîne sur ce front, d’autant que la Chine et les Etats-Unis, principaux pollueurs de la planète, ont déjà ratifié cet accord, désormais proche d’une entrée en vigueur.
« Climat : feu vert des Etats membres de l’UE pour ratifier l’accord de… », TECHNIQUE DE L’INGENIEUR, 30 septembre 2016
C’est d’ailleurs ce qui se passe depuis deux ans, le prix du pétrole a été divisé par 2, 5, tous les pays et surtout les Etats-Unis et la Chine ont constitué d’énormes stocks à des prix de pétrole bradé 1979 : il y eut la révolution iranienne, les prix du pétrole atteignirent 30 dollars.
« L’accord d’Alger de l’Opep : Nécessité d’une stabilisation des prix avec les pays consommateurs », Agoravox, 30 septembre 2016
Les recherches s’attardent essentiellement sur l’analyse des intérêts que les partenaires extérieurs (USA, UE, France, Chine, etc) ont de soutenir l’APSA et les moyens qu’ils mettent en oeuvre.
« Des armées africaines de plus en plus engagées sur le continent », TheConversation-France, 30 septembre 2016
Je passe à la suite !
Dans la plupart des affaires actuelles, par exemple Than, foulard, visa, abbé, famille, corruption, Barbie on lit les effets, certes rendus méconnaissables par l’efficacité proprement symbolique du champ judiciaire, des multiples contradictions qui traversent la société capitaliste actualisée. Il faut se garder en tout cas,comme le rappelle Marie-Angèle Hermitte, et la plupart des critiques lucides des évolutions du droit, de les traiter au cas par cas sans chercher à y lire des tendances plus profondes.
Assez rigolé. Je propose vivement la lecture d’Une saga moscovite de Vassili Axionov (1994). !